Au clair de la lune

Son ballot de draps sous le bras, Attala était en quête d'un point d'eau discret pour nettoyer ce qu'elle avait sali. De peur de se faire surprendre et plutôt que de pénétrer sans autorisation dans le château, la brunette avait reprit la direction du parc.
Le fait qu'elle n'ait croisé personne depuis le repas improvisé avec Joanis ne l'inquiétait pas outre-mesure. Pour un peu même, elle se serait prise pour la gardienne des lieux.
Dehors, le jour baissait doucement. Il lui restait peu de temps avant que la nuit arrive et cela seulement l'embêtait.
Suivant un chemin au hasard, vu que pas une âme dans le coin ne pouvait la renseigner, Attala entendit soudain un bruit reconnaissable entre mille.

Des grenouilles!!!

De joie elle en avait parlé toute seule.
Vivement elle se hâta en direction des coassements qui se faisaient plus nombreux à mesure qu'elle approchait.

Animalier Messages : 48 Date d'inscription : 02/07/2009

Après s'être restaurée et avoir remis un peu d'ordre dans la cuisine, Neige avait entraîné Joanis dans le parc.

"Allez, viens, tu as suffisamment dormi comme çà!! Quel paresseux tu fais, par moments!!... Il faut que l'on retrouve la femme qui t'a soigné et qui a préparé ce bon repas, il me semble que nous ne sommes plus très nombreux au Domaine et je me sentirais plus en sécurité si nous étions regroupés pour cette nuit, pas toi?... Tout de même, je me demande bien où est passée notre Dame, elle avait l'air de s'être remise de sa mésaventure dans le lac, pourtant... qu'allons-nous faire si personne ne s'occupe de nous?... Je n'ai pas envie de retourner chez mon oncle, ah non alors..."

Elle tendit la main à Joanis et ils sortirent du bâtiment. Le soleil commençait à baisser, les deux amis ne savaient pas trop où aller... ils entamèrent la descente vers le lac sans même réfléchir. Peut-être y retrouveraient-ils quelques personnes en train de pêcher, qui sait?...

Le crépuscule n'était pas loin et les bruits de la nuit commençaient tout doucement à se faire entendre. Neige s'arrêta soudain et mit un doigt sur ses lèvres:

"Chut, ne parle pas, écoute... tu entends? Les grenouilles!! J'adore les écouter le soir! Viens, descendons au bord de l'eau!!"

Elle lâcha la main de son ami, ôta prestement ses chausses et se mit à courir, cheveux au vent, en direction de la berge. C'est à cet instant qu'elle aperçut la jeune femme... elle stoppa net, glissa sur l'herbe humide et s'étala de tout son long...

Attala était en train d'écouter le concert des grenouilles amoureuses tout en se demandant si elle oserait faire comme elles et plonger dans ce lac si tranquille quand son coeur manqua un battement.
Sur le qui-vive, elle se retourna prête à tout et vit dans la pénombre une silhouette s'affaler presque à ses pieds.

Oh... Boudiou! Qu'est-ce...?

Par le sang de Christos! Trop grand pour estre un chat et trop petit pour un sanglier... Pis ça a des jupes...

Avant de s'agenouiller pour voir à qui elle devait cette arrivée glissante, la brunette aperçut arrivant plus lentement le jeune Joanis. Rassurée elle se permit un sourire malicieux.

Ben voilà... tout s'explique!

Hum... Ne serait-ce point là une certaine amie du nom de Perceneige? Besoin d'aide bachelette?

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"Vous connaissez mon nom?? C'est quoi, une bachelette??..."

Neige s'était relevée et frottait ses genoux pleins de terre. Elle avait sali sa robe... elle fit la moue et leva les yeux vers la Dame qui lui parlait.

"J'entendais les grenouilles, je voulais venir les voir!... Dites, vous allez travailler au Château, vous aussi? Vous n'avez pas vu la Dame du domaine? Ou Lucien?... Oh pardon, je pose toujours trop de questions..."

La fillette se retourna pour voir si Joanis arrivait à son tour.

Tiens... une bavarde en herbe!

Attala regarda la nouvelle venue en souriant, heureuse d'entendre sa voix chantante.

Alors... reprenons dans l'ordre!
Votre nom? Ben Joanis que voilà m'en bassiné les oreilles tantost.
Une bachelette? Voyons... ce n'est plus une enfant mais pas encore une jeune fille. Entre deux eaux quoi!
Si je vas travailler céant? Ben ma foi j'espère bien! Mais au train où vont les choses...
Le Lucien? Y semble avoir disparu de mesme que Messer Valerand.
La Dame? J'a point eu l'honneur de la rencontrer encore.
Tout me semble très estrange mais je m'accommode de la situation et tant que je puis aller à mon aise...

Attala haussa les épaules

On a le domaine pour nous... que demander de plus?
Dis...

La jeune femme se pencha, le regard malicieux et tentateur.

ça te dirait bachelette une baignade au clair de lune?
Personne pour nous déranger...
J'ai là des draps pour nous sécher...
Et si ton Joanis veut bien attendre sagement pas trop loin... pasque avec sa blessure pas question de faire trempette!
Alors? Oh... on m'appelle la Grenouille au fait!

Nouveau clin d'oeil et Attala tendit la main à la fillette pour la conduire au bord de l'eau.

Une eau froide et pour seule lumière la lune... Il en fallait plus pour décourager Attala. Surtout que des jours et des jours de marche sans le moindre bain...beurk!
Alors, après avoir fait signe à Joanis de se retourner et de rester à distance, elle commença par quitter ses chausses, sa coiffe, sa ceinture, son corsage, sa jupe et les posa à terre.
Puis, parce que malgré tout il faisait frisquet, la brunette fit passer sa chainse par dessus sa tête et ota sans tarder ses bas et ses braies. Tenant ses dessous sous le bras elle s'avança dans l'eau sombre.

Ouch!..... C'est froid!

Bien que grelottante Attala continua à avancer en retenant son souffle avant de prendre une grande inspiration et de s'immerger complètement.
Elle refit surface en s'ébrouant, de l'eau jusqu'aux aisselles, puis entreprit de laver tant bien que mal ses dessous.

Brrr.... tout va bien.... elle est point froide...brrr....

Pour être baclée, cette lessive improvisée le fut, mais au bout de quelques minutes dans l'eau froide, la brunette ne sentait plus ses pieds et ses dents s'entrechoquaient sans discontinuer. Jugeant qu'il y allait de sa survie et que l'eau d'un lac de montagne n'était après tout pas une bonne idée à cette époque de l'année, Attala ne tarda pas à regagner la rive où les deux jeunes gens rencontrés plus tôt s'étaient fait très discrets.
Dans la clarté de la lune, elle s'enveloppa maladroitement dans le drap emprunté lors de sa sieste réparatrice avant d'enfiler ses chausses.
Tremblant de tous ses membres, la jeune femme récupéra ses vêtements mouillés et secs avant de quitter la rive.
A peine avait-elle fait quelques pas que le concert assourdissant des grenouilles reprit.
Avec un sourire grimaçant Attala les écouta un instant.

Pfff... glagla... Fallait le dire que je vous dérangeai! Glagla... Je vous souhaite bien du plaisir, l'eau est un brin frisquette! Gla... Atchouuummm! Oups... Vite! Un feu.... les cuisines!